• Ça commence beaucoup à ressembler aux Saturnales

    Article de Judy Andreas traduit par Ey@el

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    L'Action de grâce1 est presque déjà du passé, Bob l'éponge2 a dérivé dans l'oubli et la Sainte Marie a été remplacée par le Saint Nicolas.3 Les magasins sont une symphonie de l'esprit de Noël orchestrée par l'elfe du commerce. La présence de Noël se manifeste, en effet, par les cadeaux. Tout le monde n'a que ce mot à la bouche : « acheter, acheter ». C'est la saison idéale pour accumuler des dettes avec sa carte de crédit.

    Combien pouvons-nous nous permettre de dépenser

    Ce Vendredi Noir4 les centres commerciaux se sont transformés en mauls5 tandis que le mot SOLDES a métamorphosé les rayons en fourre-tout. Des pères Noël ébouriffés ont cajolé des enfants assis sur leurs genoux devant l'objectif censé immortaliser ce grand événement.

    Tous les ans, on se creuse la cervelle devant le grand dilemme de Noël... à savoir « qui » va recevoir « quoi ». Combien pouvons-nous nous permettre de dépenser et combien allons-nous finir par dépenser. Personne ne veut passer pour un radin. Ne donnez pas d'argent... c'est ringard. Les chèques-cadeaux constituent une alternative plus subtile. Et surtout, ils peuvent générer des frais.

    Bien conditionnés par la pub, les enfants ne veulent plus simplement récupérer leurs « deux dents de devant » comme dans la chanson,6 mais plutôt faire don de leur longue « liste » de Noël aux substituts du père Noël... Papa et Maman. Leurs têtes sont pleines de visions d'iPhones plutôt que de dragées aux fruits.7 Des milliards de dollars vont être dilapidés en cadeaux, emballages, confiseries, décorations et cartes de vœux dans cette folie dépensière qui semble se déclencher, toujours un peu plus tôt, chaque année.

    Les arbres de Noël transitent dans les coffres des voitures vers les pièces où ils seront décorés et illuminés, tandis que les bas de Noël profitent de leur accrochage annuel devant la cheminée en attendant d'être remplis.

    Que célèbre-t-on le 25 décembre ?

    Au beau milieu de ces joies et réjouissances frénétiques qui s'emparent du monde, les plus songeurs s'interrogent sur le pourquoi de ces festivités. Est-ce pour célébrer la naissance de Jésus Christ, né dans une étable, à Bethléem, un 25 décembre ? Comment Noël a-t-il pu dégénérer en rien de plus qu'un rite obligatoire d'échange de cadeaux sous le prétexte d'un rassemblement familial visant à faire plaisir aux petits enfants ?

    Nulle part dans la Bible il n'est fait mention de disciples chantant « Joyeux Anniversaire, cher Jésus ». De même que n'y figure aucun commandement à honorer ce jour. C'est curieux comme la Bible reste muette à ce propos. Et pourtant, dans le American Book of Days8 de George W. Douglas, page 658, le sujet y est abordé haut et fort : « La célébration des anniversaires fut dénoncée comme coutume païenne répugnante pour les Chrétiens ».

    De Mardouk au banquet de Yule

    Quelques recherches fructueuses sur Google nous apprennent que les origines de ce jour férié remontent à plus de 4000 ans, soit des siècles avant la naissance du Christ. Les douze jours de célébration, la bûche de Noël, les offrandes de présents, et les chœurs de Noël faisant la tournée des maisons, existaient déjà chez les premiers Mésopotamiens.

    Les Mésopotamiens étaient polythéistes. Mardouk était leur dieu national. Chaque année, à l'arrivée de l'hiver, la croyance voulait qu'il affronte les monstres du chaos. (Je ne peux m'empêcher de me demander si Mardouk fréquenta le centre commercial Palisades à Nyack Ouest). Pour l'assister dans son combat, les Mésopotamiens organisaient un festival pour le Nouvel An qui durait 12 jours.

    Les Perses et les Babyloniens avaient également des fêtes similaires qu'ils appelaient Sacaea.

    Tandis que les jours diminuaient à l'approche du solstice d'hiver, les premiers Européens craignaient que le soleil ne revienne pas. Des rites étaient pratiqués pour ramener, par la ruse, le « Soleil prodigue »9 En Scandinavie, le retour du globe chaleureux était célébré au cours du Yuletide.10 Un banquet y était servi autour d'un feu alimenté par une bûche de Noël.

    Les Saturnales romaines

    Selon certaines légendes, « Noël » aurait été inventé pour rivaliser avec les fêtes païennes de décembre. Le 25 décembre était une date sacrée pour les Romains comme pour les Perses dont la religion était le mithraïsme, principal adversaire du christianisme. Dans une tentative pour rendre la religion plus attrayante pour ses adeptes, l'Église adopta de nombreux rites païens.

    On aura beau chercher sur Google, il n'existe aucun enregistrement de la date de naissance du Christ. Toutefois, la logique indique qu'il est invraisemblable, voire impossible que ce soit le 25 décembre. Comme les récits bibliques stipulent que l'enfant est né au moment où les bergers « passaient dans les champs les veilles de la nuit pour garder leurs troupeaux » (Luc 2:8), il est peu probable que des bergers, en Israël, soient restés dormir dehors avec leurs troupeaux en plein mois de décembre.

    Ce n'est qu'à partir de 350 ap. J.-C. que Jules 1er, Évêque de Rome, choisit la date du 25 décembre pour célébrer Noël, choix manifestement influencé par les réjouissances de fin d'année de l'Antiquité, en l'honneur de Saturne, dieu des moissons et de Mithras, dieu de la lumière. Le banquet romain des Saturnales était une fête en l'honneur de la divinité Saturne. Elle commençait le 17 décembre et durait sept jours. Les Saturnales étaient considérées comme une période de plaisirs et de réjouissances par les Romains. En pleine phase d'expansion du christianisme, l'Église commença à s'inquiéter de ce que ses ouailles continuent à s'adonner à des coutumes telles que le banquet des Saturnales. Il faut savoir hurler avec les loups. D'abord en passe d'être proscrit comme idolâtrie, lentement mais sûrement, le rite païen consistant à utiliser de la verdure pour décorer les foyers devint coutume admise des festivités. Une autre tradition des Saturnales concernait l'échange de bougies, de figurines en terre et autres petits présents.

    Une tradition qui se perd

    Qui a dit « petits » ? Il s'agit là d'un adjectif en danger et d'une tradition qui se perd. « Petit », de nos jours, sert à décrire la taille de son compte bancaire lorsque janvier s'affiche au calendrier de la nouvelle année et que les gens font la queue aux comptoirs des retours de marchandise de leurs boutiques favorites.

    La Fédération Nationale de Vente au détail fournit des statistiques qui donnent à réfléchir.

    En 2010, les consommateurs adultes ont dépensé, en moyenne, 830 $ chacun en nourriture, décorations et cadeaux pour le réveillon. Pour une famille avec deux parents, cela revient à environ 1.660 $ (National Retail Federation: Consumer Reports). Ajoutez ce coût au solde de carte de crédit du ménage américain moyen qui, pour 2010, s'élève à 15.788 $ avec un pourcentage annuel de 14,67.

    Source : CreditCards.com, Weekly Rate Report, May 2010

    « Et voilà, le Grinch Andreas qui remet ça »11

    Pas du tout. Que l'origine de ces festivités soit séculaire ou spirituelle, « l'offrande » demeure une question à part. Sauf votre respect, n'allez toutefois pas confondre le matérialisme galopant, l'avarice et la gloutonnerie avec l'esprit de générosité. Il y a toutes sortes de cadeaux qui ne relèvent pas tous du domaine matériel. Un cadeau ne doit pas nécessairement ruiner le compte en banque d'une famille ni même lui briser l'échine.

    Est-ce si difficile d'imaginer ce que peut représenter le don de son temps à celui qui est seul ?

    Un jour, j'ai travaillé pour une soupe populaire à New York. Voir ces files interminables de gens affamés venus chercher leurs petits sacs marrons m'a fendu le cœur bien des fois. Et la seule chose que dont je leur faisais don était mon temps.

    Des sites comme Giving @ Home and BeAnElf.com proposent une variété de services d'aide à des personnes dont on n'entendrait pas parler autrement. Un cadeau peut être quelque chose d'aussi simple et économique que « l'écoute ».

    Les fêtes de fin d'année sont des jours bénits.12 Il y a, pour nous, maintes façons de les honorer et de nous honorer. Nous pourrions peut-être songer à la meilleure manière de les passer. Un tour dans une grande surface ne devrait pas nécessairement faire partie du rituel.

    Traduit de l'anglais par Ey@el
    © lapensinemutine.eklablog.com

    Notes et références

    1. ^ L'Action de grâce ou Thanksgiving est une fête célébrée au Canada le deuxième lundi d’octobre et aux États-Unis le quatrième jeudi de novembre. Certains pays la célèbrent à d'autres dates. Historiquement, Thanksgiving était un jour de fête chrétienne durant lequel on remerciait Dieu par des prières et des réjouissances pour les bonheurs que l’on avait pu recevoir pendant l’année, cette célébration est désormais laïque en Amérique du Nord, les administrations et la plupart des entreprises étant fermées ce jour-là.
    2. ^ Bob l'éponge (SpongeBob SquarePants) est une série télévisée d'animation américaine créée par Stephen Hillenburg. La série se focalise sur les exploits et aventures d'une petite éponge jaune carrée et de ses amis localisés au fond de l'Océan Pacifique dans une ville nommée « Bikini Bottom ». La popularité de l'émission a permis de créer une franchise. Cette série est celle qui fait le plus d'audience sur la chaîne Nickelodeon, qui est la plus distribuée sur MTV Networks et figure parmi les dessins animés Nicktoons les plus regardés. Depuis 2011, Bob l'éponge est le seul Nicktoon des années 1990 encore diffusé.
    3. ^ Le père Noël est l'équivalent français du Santa Claus américain dont le nom est lui-même une déformation du Sinterklaas (saint Nicolas) néerlandais. Il s'inspire également largement de Julenisse, un lutin nordique qui apporte des cadeaux, de la fête du milieu de l'hiver, la Midtvintersblot, ainsi que du dieu celte Gargan, (qui servit de modèle au Gargantua de Rabelais) et du dieu viking Odin qui descendait sur terre pour offrir des cadeaux aux enfants scandinaves. De Julenisse, le Père Noël n'a conservé que la barbe blanche, le bonnet et les vêtements de fourrure rouges.
    4. ^ Aux États-Unis, le Vendredi noir ou Black Friday fait référence au lendemain du repas de Thanksgiving et marque traditionnellement le coup d’envoi de la période des achats de fin d’année.
    5. ^ Jeu de mots intraduisible associant « malls » (centres commerciaux) et « mauls » (terme de rugby). Dans le détail, un maul (de l'anglais : « malmener ») est constitué par un joueur debout portant le ballon, un ou plusieurs adversaires et un ou plusieurs coéquipiers qui sont liés à lui. Les joueurs de l’équipe attaquante doivent être sur leurs pieds et avancer vers la ligne de but adverse, sinon l’arbitre est forcé d'arrêter le jeu et ordonner une mêlée en rendant l’introduction à l’équipe défendant. Un maul qui avance bien est un groupé pénétrant (voir). S'il avance en permettant à ses participants de sortir du maul puis d'y revenir régulièrement pour maintenir sa marche, on parle de « maul déroulant ».
    6. ^ "All I Want for Christmas Is My Two Front Teeth" est une chanson de Noël écrite par Donald Yetter Gardner lorsqu'il enseignait dans les écoles publiques de Smithtown à New York. Il demanda à sa classe ce qu'elle désirait pour Noël et observa que plusieurs de ses élèves avaient perdu une dent, lorsqu'ils ouvrirent la bouche à l'unisson. Gardner écrivit la chanson en 30 minutes. Dans une interview de 1995, Gardner indiqua combien il fut étonné lorsqu'il vit que cette chanson innocente fut reprise dans l'ensemble du peuple américain. En 1948, elle avait été enregistrée par Spike Jones & His City Slickers et interprétée par George Rock. Cette version atteignit le sommet des palmarès en 1949. Elle a été reprise par plusieurs artistes et producteurs musicaux, dont George Strait, Danny Kaye avec The Andrews Sisters, The Platters, Nat King Cole, The Chipmunks, le Hampton String Quartet, Amanda Sollum et l'équipe de Sesame Street.
    7. ^ Les « sugar plums » sont des sortes de dragées rondes ou ovales faites de fruits secs recouverts de sucre durci et coloré.
    8. ^ The American Book of Days est un compendium des grands événements et commémorations de l'histoire américaine.
    9. ^ Jeu de mots intraduisible entre « Sun » (le « soleil ») et « Son » (le « fils ») faisant référence au « fils prodigue » de la Bible.
    10. ^ Yuletide (ou « Yule Time »). « Yule » est un mot d'origine scandinave associé à l'hiver.
    11. ^ Le Grinch est un film américain réalisé par Ron Howard en 2000 avec Jim Carrey dans le rôle principal. Ce film est l'adaptation cinématographique du livre Le Grincheux qui voulait gâcher Noël écrit en 1957 par Theodor Seuss Geisel et du dessin-animé Comment le Grinch a volé Noël, réalisé par Chuck Jones en 1966.
    12. ^ Jeu de mots intraduisible entre « Holidays» (« fêtes de fin d'année », dans ce contexte) et « Holy Days » (« jours bénits »).
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  • Commentaires

    1
    Vendredi 20 Décembre 2013 à 17:02

    Felicitations .  Vous avez ete elue Blog du jour par l administration d Eklablog

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    2
    Samedi 21 Décembre 2013 à 21:41

    Capricieux ou pas, enfin un blog pas triste...! j'♥   Bien Ey@el... "les élections" ça réchauffe le ♥, c pour ça qu'il y en a autant  ;-)

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