• D'un humain sur Terre

    Article d'Ey@el

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    Ça faisait longtemps, tellement longtemps qu'on l'attendait... Mais quoi donc ? La sortie du premier album solo d'EOB (alias Ed O'Brien), pardi ! Enfin, moi et un paquet d'autres personnes qui avions su percevoir en lui un peu plus que le beau gosse tisseur de paysages sonores au sein du plus grand groupe depuis les Beatles. On pourrait même aller jusqu'à dresser un parallèle avec George Harrison mais je ne m'y risquerai pas. Ce serait bien trop réducteur. Et puis parce que, célèbres ou pas, nous sommes tous uniques et incomparables, quelle que soit la ou les contributions que nous sommes venus apporter sur Terre. Pour certains, c'est juste plus évident que pour d'autres, c'est tout.

    Après sept années de gestation donc, entrecoupées d'une longue parenthèse pour l'enregistrement (dans le sud de la France) de A Moon Shaped Pool suivi d'une tournée mondiale, Ed O'Brien sort (temporairement) de l'ombre de Radiohead pour permettre enfin à sa propre lumière d'illuminer à son tour nos oreilles fatiguées de toutes ces infâmes bouillies sonores sans âme dont on nous abreuve à la louche et dont la fonction principale semble être de remplir les tiroirs-caisse du lobby de l'industrie musicale et, accessoirement, de nous abrutir de messages creux voire glauques (ou carrément sataniques pour certains).

    Pour ce faire, il s'est entouré de son ami Flood (U2, Depeche Mode, Smashing Pumpkins, P.J. Harvey) à la prod et de musiciens de prestige comme David Okumu (Invisibles) et Adrian Utley (Portishead) à la guitare, Glen Kotche (Wilco) et Omar Hakim à la batterie, Nathan East et même Colin Greenwood (Radiohead) à la basse ainsi que Laura Marling.

    Quelque chose d'humain

    Earth (la Terre) — qui en anglais se trouve être l'anagramme de heart (le cœur) — se veut donc, selon ses propres mots, « un disque existentiel de dance music » venu du cœur et largement inspiré par la nature dans laquelle il a eu besoin de s'immerger, d'abord dans une ferme brésilienne puis dans les montagnes galloises, afin de se retrouver en tant qu'artiste mais également (et surtout) en tant qu'être humain.

    « Ce disque, c'est qui je suis. C'est ma vérité... Je ne veux pas qu'on me définisse comme un type qui fait partie d'un groupe à succès. Je suis juste un être humain incarné sur cette planète. »

    Parce qu'« humain » est certainement le terme qui sied le mieux à Ed O'Brien, bien plus que l'étiquette « rockstar » à laquelle il ne s'identifie absolument pas. Et, pour avoir eu la chance et le privilège de le rencontrer et d'échanger brièvement quelques mots avec lui, le temps d'une photo, sur un plateau de télévision à Paris, à la fin du tournage d'Echoes — la nouvelle émission rock live de la chaîne ARTE animée par Jehnny Beth — juste avant le confinement, je peux vous assurer que ça n'a rien de surfait et qu'il ne s'agit pas juste d'une pose.

    Il émane de sa personne une réelle humilité et une authenticité telle que l'on ne saurait s'y tromper. Cette façon qu'il a de vous regarder, du haut de son mètre quatre-vingt seize, avec ses grands yeux bleus bienveillants, et de vous écouter avec un intérêt non feint (que vous soyez une célébrité, un animateur, un technicien ou un simple membre du public) en vous élevant au même niveau que lui, c'est vraiment très rare dans ce milieu. Et dans la société en général d'ailleurs. J'ai rencontré pas mal de musiciens dans ma vie, certains célèbres d'autres moins, mais des comme lui jamais. À l'exception, sans doute, de Mike Peters de The Alarm. Et il vibre tellement haut que j'ai carrément mis une semaine à m'en remettre : d'ordinaire j'ai plutôt l'habitude de me faire plomber par des vampires énergétiques, pas de me faire renflouer comme ça !


     Photos © Walter Films/Sabrillena_b/lapensinemutine

    Un point bleu pâle

    Earth parle d'isolement et de solitude, de fins et de nouveaux départs. « C'est un peu la thématique générale » explique Ed. « C'est ma perception de ce qui se passe à plus grande échelle, la fin d'un système en quelque sorte ». Une vision d'ensemble. C'était d'ailleurs ce que suggérait le titre initialement envisagé : Pale Blue Dot (un point bleu pâle) d'après une célèbre photographie de la planète Terre prise par la sonde Voyager 1 en 1990 — mais qui ne fut pas retenu pour des raisons de droits d'auteur.

    « Nous avons reçu cette incroyable planète en cadeau et c'est la plus belle de notre système solaire. En termes de potentiel d'hébergement de la vie, c'est la seule que nous connaissions pour l'instant. Pourtant, nous nous comportons comme si nous étions cette espèce toute puissante à qui elle devait tout et nous l'exploitons comme s'il s'agissait d'une ressource inépuisable. Les paroles de Carl Sagan nous imploraient d'arrêter nos conneries . »

    « [Et ce point bleu pâle] c'est nous. C'est notre maison. C'est sur cet infime grain de poussière qu'ont vu le jour tous les dictateurs et toutes les guerres. C'est sur la tache minuscule sur cette photo qu'ont aimé tous les amants. Et là encore, je ne sais pas pourquoi ces choses résonnent si fort en moi, comme beaucoup d'ailleurs, mais c'est comme ça. Cette vision d'ensemble encore une fois, c'est ce qui a inspiré ma musique. »

    Hauts les cœurs

    Un album chargé d'émotion et d'authenticité dont chaque morceau s'inspire de son vécu personnel : « J'ai besoin de le ressentir, autrement je ne peux pas... je ne joue aucun rôle » confie Ed.


    © EOB Official

    « J'ai essayé de sortir de mon mental pour aller vers mon cœur. Et c'est ainsi que l'on trouve intuitivement comment faire. Je viens d'Oxford, un lieu académique très cérébral. Et c'est super, mais le souci c'est que l'on risque de se fermer au niveau du cœur. Et pour moi, ça a été comme une sorte de mantra : "hors de ma tête et dans mon cœur". On y va au feeling et le mental est obligé de suivre. Parfois, il y a des choses à revoir mais c'est mon truc désormais. Musicalement, je me laisse entièrement guider par mon intuition. Je ne force rien, il y a quelque chose, une étincelle. Et c'est génial parce que ça veut dire qu'on est présent. »

    « Il est clair que nous traversons une période très difficile et je voulais faire un disque qui reconnaisse ce côté sombre mais qui, en même temps, soit plein d'espoir. Je pense que nous avons besoin d'entendre un autre son de cloche en ce moment parce que clairement, les médias nous bombardent de nos abjections les uns envers les autres mais omettent de nous parler de toutes les choses formidables que nous faisons. Je voulais donc évoquer cette noirceur mais également mettre l'accent sur les éclats de lumières qui transparaissent. »

    Et au vu des circonstances actuelles, Ed demeure étonnamment optimiste : « Je le sens, nous sommes arrivés à ce grand moment de transformation. C'est énorme. »

    Oui, je le sens aussi. Nous le sentons tous. La résonance de Schumann (fréquence électromagnétique de la Terre) n'arrête d'ailleurs pas de s'amplifier. Mais comment fait-il pour être aussi positif alors qu'il vient d'un groupe qui s'est fait connaître mondialement par une chanson d'abord bannie des ondes en Angleterre car jugée « trop déprimante » ("Creep") ?

    « J'ai travaillé dur pour ça » se défend-t-il. « Méditation, sevrage d'alcool, nourriture saine, règlement de mes problèmes émotionnels... J'ai été accompagné dans ce périple par un coach personnel formidable qui m'a dit : "Tu n'aideras personne en broyant du noir". Et j'avais tendance à m'en cacher. Je ne montrais jamais au groupe que j'étais déprimé. Trouver le bonheur et la paix d'esprit est un truc vieux comme le monde et un voyage enseigné depuis des milliers d'années qui se fait toujours en interne. Il n'y a qu'à écouter toutes les interviews dans lesquelles George Harrison et John Lennon en parlent. »

    La lumière intérieure

    Ed raconte qu'il n'avait jusqu'ici jamais ressenti le besoin de se lancer dans une carrière solo, sa créativité au sein de Radiohead et son rôle de père de famille suffisant à son épanouissement. Mais les enfants ont grandi et lui aussi. À l'intérieur. Et nos besoins changent en fonction de notre évolution. Il s'est senti soudain comme poussé par un besoin compulsif de composer, manquant d'abord de confiance en lui et ne sachant pas trop par quel bout s'y prendre pour finir par céder entièrement à son désir insatisfait sans se préoccuper du reste. Et les chansons ont commencer à émerger. Naturellement. Ce fut même la grande surprise car il n'avait rien prémédité.


    © EOB Official

    Avouant ne pas être « multi-tâches », il a besoin de se plonger à fond dans ce qu'il fait pour être créatif, ce qui explique en partie le temps qu'il lui aura fallu pour passer du rêve à la réalité. Mais ce fut aussi un apprentissage. Une sorte de coming out. De sa zone de confort. Et pour lui, impossible d'être inspiré ailleurs que dans la nature. Alors il a loué un petit cottage dans un endroit très reculé du Pays de Galles, pas très loin de là où Robert Plant et Jimmy Page ont écrit Led Zeppelin III et Led Zeppelin IV (mon album préféré).

    « On entend "Battle of Evermore" dans ces terres. Elles sont très, très fertiles. Un endroit incroyable » explique-t-il.

    Et puis, il y a la discipline, une sorte de rituel pour commencer la journée qui consiste pour lui à se ressourcer au sommet de la montagne, descendre jusqu'à la rivière avec quelques poèmes de Blake ou de Whitman sous le bras, et au retour, la musique coule à flot sans rien forcer.

    L'inspiration infuse en quelque sorte. Comme Aretha Franklin qui disait canaliser Dieu.

    « Si vous me demandez comment j'ai écrit ces chansons, je ne saurais quoi vous répondre. J'ai l'impression de ne pas les avoir écrites.  J'ai toujours eu du mal à le formuler ainsi. C'est comme si elles avaient émergé toutes seules. C'est ce disent beaucoup de personnes, un bon nombre de compositeurs. Cela n'a rien à voir avec eux, c'est de la canalisation. »

    Mon cœur s'ouvre à ta voix

    Et puis ce sur quoi on le guettait au tournant, c'était la voix. Un défi majeur. Car forcément, passer devant le micro, ce n'est pas la même chose que de faire les chœurs derrière Thom Yorke. Parce que comme il dit, la voix est l'élément principal d'une chanson. C'est par elle que transite toute l'émotion et l'intention. La voix ne trompe pas. C'est la fréquence de l'âme. Et une bonne chanson peut être réduite à néant par une voix qui ne colle pas (et ce n'est pas Auto-Tune qui y fera grand chose en matière d'émotion). Et quand cette vibration résonne avec la nôtre... bingo, c'est le coup de foudre artistique !

    Ed en avait tellement conscience que, pendant longtemps, il avait envisagé de faire chanter ses chansons par quelqu'un d'autre. Une chance que Flood l'ait convaincu de se lancer. Et franchement, il aurait été extrêmement dommage de nous priver d'une voix aussi agréable que la sienne, dotée un registre étonnamment étendu et qui semble trouver son aise aussi bien dans les aiguës que dans les graves, glissant avec fluidité d'une tonalité à l'autre.

    Et puis, réécoutez donc les débuts de Radiohead et vous verrez que Thom Yorke n'a pas toujours été au niveau d'excellence vocale où il en est aujourd'hui. D'ailleurs Ed le reconnaît volontiers.

    « J'en suis encore aux prémisses de ma voix. Nous allons partir en tournée cette année et la voix est comme un muscle. Plus je la solliciterai et plus je chanterai, plus elle se renforcera et mieux je pourrai la contrôler. Mais avec ce disque, il y a eu l'étape où j'ai enfin pu m'entendre dans les retours sans grincer ni tressaillir à la moindre syllabe sortant de ma bouche. J'ai réussi à m'extraire de ma zone de confort et c'était ce qu'il me fallait. »

    Le tour de la Terre en 9 chansons

    1. Shangri-La



    Avant de pouvoir écouter les morceaux en entier, vous devez vous inscrire gratuitement sur Spotify.
    Pour écouter/acheter en ligne : eob.lnk.to/EarthIB

    Morceau très funky avec son refrain syncopé scandé en boucle comme un mantra, "Shangri-La" — qui tire son nom d'un événement artistique nocturne du festival de Glastonbury, dans le sud-ouest de l'Angleterre où Ed se rend chaque année en tant que spectateur quand il n'y joue pas lui-même avec Radiohead — a été écrit en 2014, au retour de son pèlerinage annuel de reconnexion à sa « tribu ».

    Une super lune illumine le ciel
    Et tous les cygnes
    Déploient leurs ailes
    Pour s'envoler à nouveau...

    « On se sent si heureux et tellement en paix à Glastonbury. C'est ce dont parle cette chanson mais aussi du chemin pour essayer de trouver la paix d'esprit dans sa vie et se rassembler pour célébrer tout ça. »

    Celebration is gratitude.

    Glastonbury est également un lieu spécial chargé de mythes et de légendes qui, dans les temps anciens, était une sorte d'île, la mer recouvrant les basses terres comme en témoignent certains vestiges de cette époque. Le site est célèbre pour sa colline (tor) supposée marquer l'emplacement même de la mythique Avalon de la légende du Roi Arthur.

    2. Brasil

    Titre phare (et premier single) de l'album, qui commence comme une ballade acoustique mélancolique pour se transformer à mi-chemin en une espèce de transe électro-extatique emmenée par la basse omniprésente de Colin Greenwood,  "Brasil" est véritablement « le cœur et l'âme » de l'album.

    Il aurait été inspiré par "Movin' On Up" de Primal Scream, une sorte de déclic qu'il aurait eu en écoutant l'album Screamadelica durant son séjour sabbatique au Brésil. « J'en ai eu des frissons dans le dos et je me suis dit : "C'est le genre de musique que je veux faire". Et c'est ce qui s'en dégage. Cette chanson est essentiellement du gospel avec un groove dansant. Et c'est là-dedans que j'ai puisé pour mon disque, ce passage de l'ombre à la lumière. »

    Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut
    En chute libre... en chute libre...
    Combien de temps encore
    Avant que tu ne retrouves le sourire
    Et le goût de rire ?

    De la petite référence à la Table d'émeraude — un des textes les plus célèbres de la littérature alchimique et hermétique — (« Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut ») sur la correspondance entre le macrocosme et le microcosme, Ed s'avoue fasciné par tout ce savoir ancien et cite l'ouvrage de Manly P. Hall, The Secret Teachings Of All Ages (les enseignements secrets de toutes les époques). « Il y a de la magie là-dedans ! » dit-il.

    3. Deep Days

    Un titre très latino et sensuel dans lequel Ed O'Brien se transforme en soulman avec ce petit grain dans la voix qui file des frissons partout. Et pour autant, ça brasse aussi en profondeur. Chaud devant, sortez les ventilos !

    « Au fond de moi, j'ai toujours senti que sommeillait un chanteur de soul. Je sais que c'est un peu prétentieux, mais j'essaie juste d'être honnête. »

    Nous sommes ces gens aux portes de la nuit,
    Désormais réunis pour ancrer la lumière.
    Ce soir, nous ouvrons le bal pour ne jamais renoncer.
    Ensemble, nous nous mouvons, jamais nous ne cesserons...

    4. Long Time Coming

    Une ballade acoustique qui me tient beaucoup à cœur tant elle résonne en profondeur et capture l'essence même de mon existence. Cette longue attente solitaire de quelque chose et/ou quelqu'un qui viendra bouleverser votre vie et vous remettra sur le chemin. Ce sentiment d'aliénation au milieu de la foule que l'on n'a jamais en pleine nature.

    Et la seule chose dont nous avions besoin,
    C'est de quelqu'un qui nous dise :
    « Je crois en toi ».

    5. Mass

    Que sommes-nous dans l'immensité cosmique si ce n'est qu'une poussière d'étoile ?

    Je ne suis rien...
    Je ne suis rien...

    Un morceau éthéré évoquant l'espace que Ed dédie sur scène à son ami astronaute Michael Massimino qui a participé à la réparation du téléscope Hubble lors du dernier vol de la navette spatiale américaine. Inspiré du fameux « point bleu pâle » dont nous parlions plus haut et sans doute aussi un peu d'Interstellar, son film préféré.

    6. Banksters

    Un autre titre que j'affectionne tout particulièrement et que je vous avais déjà présenté dans sa version live et qui se voit affublé du terme « explicite » sur les plateformes de streaming en raison du vilain mot qui ne choquera personne en France parce que nous sommes gouvernés par un ancien bankster et sa clique d'enc... comment il dit déjà, Ed ? :D

    Où est passé tout le fric, bande d'enculés ?

    Pour la petite anecdote, il nous confiait récemment (dans un tchat sur Spotify lors d'une session d'écoute improvisée) qu'il avait beaucoup de mal avec ce morceau. Sans doute à cause de la colère qui y est exprimée et qui ne reflète plus son état d'esprit et sa vibration ? Ou parce qu'il n'est pas entièrement satisfait du rendu ?

    « Quand je joue cette chanson à la guitare acoustique, elle sonne comme une bossa nova. Pour le refrain, j'ai essayé de créer une sorte d'hybride latino White Stripes vs Led Zeppelin. »

    7. Sail On

    Ed raconte comment il a vraiment eu envie de se mettre à apprendre à jouer de la guitare après avoir entendu le son produit par celle d'Andy Summers sur "Walking On The Moon" qui était parvenu à recréer un paysage sonore lunaire. C'est l'effet que me fait ce morceau où chaque fois, je me retrouve propulsée seule sur une petite embarcation au milieu d'une mer d'huile sous un ciel étoilé au clair de lune, bercée par le doux clapotis des vagues et une brise à peine perceptible. En général, j'ai toujours plus de facilité à me représenter les sons et les odeurs que les images. Ce qui en dit long sur le pouvoir évocateur de sa musique. Du moins avec moi.

    Hommage à un cousin décédé durant les sessions de l'album, "Sail On" parle de la mort et de la vie après la mort : « Notre âme continue de vivre et nous aussi, il n'y a que notre corps physique qui meurt. »

    Il est temps de dire adieu à tout ce que je connais,
    Une traversée de plus que nous devons tous entreprendre.
    J'aperçois la lumière qui s'approche de moi,
    Aucun doute désormais, tout ce qui est sera.

    « J'ai beaucoup lu au sujet d'expériences de mort imminente et ce qui arrive quand les gens parlent d'aller vers la lumière, quand ils se noient et reviennent à la vie, qu'ils quittent leur corps. Mais il n'y a ni peur ni terreur. Cette chaleur et cet amour semblent en quelque sorte correspondre à de nombreuses choses qui résonnent en moi comme la réincarnation et la philosophie bouddhiste. Je ne suis pas bouddhiste, mais beaucoup de choses dans cette philosophie me parlent. »

    Et moi donc !

    Pour information, il m'a récemment confirmé sur un autre tchat en ligne (hé oui, il est partout et j'en profite pour aller à la pêche aux questions) que "Sail On" avait été enregistré en 432 Hz (voir Articles connexes) : « C'est très profond [comme effet]. Le prochain album sera entièrement en 432 et 444 ».

    Le La 444, je ne connaissais pas mais John Lennon aurait enregistré son merveilleux "Imagine" à cette fréquence.

    8. Olympik

    "Olympik" est selon les propres dires de Ed, le morceau le plus représentatif de qui il est. « C'est la chanson mère de l'album » ajoute-t-il.

    Et c'est vrai que ça envoie. Surtout en live où le son est moins compressé et où les guitares ont plus d'espace. « Je voulais recréer une grosse ambiance à la Earth, Wind & Fire » précise-t-il. En l'occurrence, moi ça me fait davantage penser à U2 mais bon.

    Donne-moi ton vin, donne-moi ton feu,
    Et élève-nous vers les plus hauts sommets.
    Un amour suprême, c'est tout ce dont j'ai besoin
    Pour me sortir de ce profond sommeil.

    Aucun risque de s'endormir en écoutant cette chanson qui est un véritable kaléidoscope de sons, de rythmes, de lumières et de couleurs. À l'image du carnaval de Rio dont il s'inspire bien sûr. Mais pas que.

    « Je l'ai appelé "Olympik" avec un K d'après "808 State" de Cubik en hommage à ce morceau. C'est la dernière chanson écrite pour l'album. Une espèce de rave, c'est ce que je recherche. Cette l'ambiance que je souhaite pour les concerts. Je ne sais pas si ça le fera mais en tout cas, c'est le but visé. »

    Au vu de la réaction du public lors de son concert privé sur la scène au Palais de Tokyo à Paris, en mars dernier, je dirais que c'est en bonne voie. You got the groove, baby !

    9. Under The Cloak Of The Night

    Et enfin, la perle qui clôture cet album en parfaite harmonie vocale avec Laura Marling dont il se dit un immense fan : « Une voix féminine, c'est très important, je crois. Elle est venue passer un après-midi en studio, c'était fantastique. Nous avons chanté ensemble sur "Cloak Of The Night", ce qui est un privilège extraordinaire mais j'étais terriblement nerveux, doutant de mes capacités. J'aurais bien aimé être plus détendu, rire un peu plus sans doute, mais bon... »

    Une ballade acoustique (également enregistrée en 432 Hz) très évocatrice de l'ambiance brumeuse des paysages gallois qui l'ont inspirée et qu'on verrait bien figurer sur la bande originale d'une adaptation de roman d'Emily Brontë.

    En cette nuit où souffle le vent du nord
    Qui fait claquer les arbres,
    Et où la Terre pousse de véritables hurlements,
    Tout est en train de disparaître
    Et je sais qu'en ces temps, il faut renoncer à la peur
    Pour permettre à l'amour de triompher.

    « "Cloak Of The Night" est une chanson où il est question d'amour dans la tourmente — qu'il s'agisse d'une tempête météorologique, d'une tempête de la vie ou d'une tempête intérieure — et de s'accrocher à cette ou ces personnes. »

    Il ne croyait pas si bien dire.

    Hail To The Minstrel

    Ce à quoi, je lui laisse le mot de la fin qui, à mon sens, résume très bien toute la beauté et la sagesse du personnage. Comme quoi les grands sages ne sont pas toujours forcément gras, chauves et bigleux et les musiciens de rock pas tous cons, arrogants et nombrilistes.

    « Je suis comme n'importe quel autre humain — je ne crois pas qu'il y ait un seul auteur qui ait quelque chose d'entièrement nouveau à dire. C'est juste la manière dont c'est formulé. Il existe une certaine universalité dans les expériences humaines... Quand on décide que l'on doit faire de la musique ou de l'art, c'est la vérité que l'on recherche, pas la perfection. »

    « J'ai toujours pensé que le rôle d'un musicien est d'être au service des gens. Et quand on me dit : "Oh, les mecs, vous êtes géniaux" ou "tu es génial", je réponds qu'il y a 100 ou peut-être 200 ans, si j'avais été musicien alors, j'aurais voyagé de ville en ville à cheval ou à dos d'âne. C'est juste notre culture moderne qui nous met sous les feux des projecteurs pour, en quelque sorte, nous téléporter dans le foyer et la vie des gens. La musique joue un rôle très important pour eux. Nous ne sommes pas des travailleurs de première ligne, il n'est pas question de vie ou de mort, mais nous pouvons contribuer à élever des personnes. La musique peut aider à traverser des trucs. La musique mélancolique peut vous permettre de vous abandonner à la mélancolie, d'avoir envie de pleurer et de pleurer pour évacuer tout ça. Mon rôle, quand je compose et quand j'enregistre, est d'abord d'être au service de la chanson. Et lorsque c'est terminé, c'est la musique qui se met au service de ceux qui veulent l'entendre. »

    Ey@el

    P.S. : Cet article était déjà en ligne depuis plusieurs heures quand Ed a participé à un questions-réponses organisé par Fender sur Twitter. À cette occasion, j'ai pu lui demander si le triangle ouvert inversé de la pochette de son album, qui se trouve être le symbole du féminin sacré, avait été choisi pour cette raison, ce qu'il m'a confirmé en ajoutant : « Ce signe est également celui de la Terre ». (Il se trouve que c'est celui de l'élément terre, celui de la planète étant totalement différent mais on ne va pas chipoter sur les détails !)

    NOTE : Tous les propos cités dans cet article proviennent de nombreuses sources dont vous trouverez la liste ci-dessous et ont bien sûr tous été traduits par mes soins.

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