• En quoi le jugement des autres peut-il nous être utile ?

    Article d'Ey@el

    © Jon D. Gemma

    S'il est un fait indéniable lorsque l'on entreprend un travail sur soi et que l'on désire progresser, c'est qu'il est indispensable, en premier lieu, de parvenir, coûte que coûte, à se détacher du jugement des autres. En effet, chacun interprète le monde et ce qui l'entoure en fonction de ce qu'il capte sur son écran radar, de ses propres expériences, de la réalité telle qu'elle lui apparait et surtout de ses projections mentales — soit un savant cocktail de conditionnements socio-familiaux et de fonctionnements (ou dysfonctionnements) complexes de l'ego. Bref, tout le monde se fait un peu ses propres films qu'il projette sur l'écran 3D de ce que nous appelons communément « réalité ».

    Ainsi donc s'identifier ou se définir par rapport à l'image que nous renvoient les autres de nous-même est carrément à bannir au risque de nous transformer en caméléons ou pire, nous rendre complétement schizophrènes. Certes, j'exagère un peu, mais comment pourrait-on être toutes ces personnes si radicalement différentes à la fois ? Par « toutes ces personnes », j'entends bien sûr les perceptions multiples que peuvent avoir les autres de nous selon les circonstances dans lesquelles se produisent nos interactions — les nôtres autant que les leurs d'ailleurs. De quoi devenir fou !

    Quand je serai roi,
    Tu seras le premier que j'épinglerai,
    Toi et ton opinion sans importance.
    Qu'est-ce que tu dis ?
    Je suis peut-être parano
    Mais certainement pas androïde !

    "Paranoid Android", Radiohead (1997)

    Explorons la sémantique

    Notez que je parle de « perception » et non de « jugement ». Quelle est donc la différence ?

    Perception Représentation d'un objet construite par la conscience à partir de sensations.

    Jugement Opinion, avis, sentiment. Fonction ou acte de l'esprit consistant à affirmer ou à nier une existence ou un rapport.

    D'un point de vue sémantique, comme le montrent ces définitions du dictionnaire, il apparait clairement que tout jugement passe d'abord par une perception. Qu'il s'agisse d'exercer son discernement à partir de faits établis ou non, cette appréciation implique toujours la prise en compte d'une sensation.

    Pour s'en référer au jugement au sens le plus littéral, prenons l'exemple d'un procès où le jury délibère. Chacun de ses membres analysera les faits et preuves qui lui auront été présentés par les deux parties adverses mais, au final, pour rendre son verdict, il se basera sur son intime conviction inconsciemment dictée par son ressenti personnel.

    Maintenant, les sensations, c'est quoi au juste ? Une fois encore l'ami Dico vient à la rescousse :

    SensationPhénomène psychique élémentaire provoqué par une excitation physiologique. Faire sensation : produire une vive impression sur autrui.

    Voilà maintenant que de sensation nous passons au concept d'impression. Nul besoin d'encre et de papier ici :

    ImpressionEmpreinte laissée dans l'esprit par quelqu'un ou quelque chose.

    Or, à l'instar d'un cliché photographique, une empreinte est statique, figée, définie à un point donné pour l'éternité (du moins la durée de vie de l'encre et du papier ou désormais de celle de son support numérique), ce qui n'est pas le cas de tout être vivant qui évolue au fil du temps voire d'un instant à l'autre. Par conséquent, lorsque nous laissons une impression à quelqu'un, cette dernière ne saurait nous définir parce qu'il ne s'agit que d'un aspect ponctuel de nous-même, ou plutôt des énergies émanant de nous à un certain moment révolu.

    On ne peut définir que ce qui est figé

    Imaginez que vous ayez passé une très mauvaise journée où tout serait allé de Charybde en Scylla. Votre vibration est alors au plus bas. Même si nous sommes tous différents dans nos manières de réagir au aléas de la vie courante et selon leur gravité, je pense pouvoir affirmer sans risque de me tromper que la plupart d'entre nous ne se montre pas sous son meilleur jour en ces occasions-là. Sans citer d'exemple précis afin d'éviter que l'on se focalise justement sur l'exemple (forcément limitatif) et non sur le fond du problème — disons que vous rencontrez une autre personne qui ignore tout de vos mésaventures récentes et de votre journée pourrie, il y a alors fort à parier que l'impression qu'il ou elle aura de vous sera bien différente de ce qu'elle aurait pu être un tout autre jour et n'aura rien à voir avec qui vous êtes la plupart du temps. Suite à ce qu'elle ressent (sensation) émanant de vous, parfait(e) inconnu(e) jusqu'alors, elle peut décider de ne pas vous revoir ou de vous éviter à l'avenir (jugement).

    Cela veut-il pour autant dire que vous êtes nul en tant qu'individu ? Non, bien sûr ! Sans doute avez-vous mal géré la situation et manqué une opportunité mais vous n'avez été nul que sur ce coup-là et ce n'est pas une définition à perpétuité. En vous focalisant sur cet épisode, vous risquez de le reproduire, non pas parce que vous vous définissez comme nul mais parce que vous laissez l'impression d'une autre personne vous définir et vous figer dans une mauvaise vibration (oui, je sais, il faut suivre !). Or on ne peut définir QUE ce qui est figé. Capito ?

    Oui, mais bon, cela ne nous dit toujours pas en quoi le jugement des autres pourrait nous être utile ?

    Cinéma réalité

    « Pas si vite ! » comme dirait Robert Lamoureux dans la 7ème Compagnie.

    En fait, c'est très simple : si, comme nous l'avons vu, notre état vibratoire influe majoritairement sur la qualité de l'impression que nous produisons sur autrui, constater leur réaction, qu'elle soit positive ou négative, constitue un précieux baromètre de nos vibrations. Comme les mots et le ton que nous employons pour communiquer, à l'oral comme à l'écrit, jouent également un rôle important dans cette perception, l'opinion des autres, leur réaction peut nous aider à travailler sur ces aspects afin de permettre à nos émissions d'être plus conformes à nos pensées et à nous même. Ne soyons pas notre propre téléphone arabe en déformant inconsciemment nous-mêmes nos messages à la source.

    Bien entendu, cela n'empêchera pas, malgré tous nos efforts de bien communiquer et d'être en accord avec ce que nous prêchons, que certains de nos interlocuteurs aient une perception erronée s'ils manquent d'ouverture en général ou à ce moment précis (déconnexion passagère) auquel cas, rien que vous n'y fassiez ne pourra changer cette image faussée puisque je vous rappelle que nous créons notre réalité non pas par nos pensées positives ou négatives mais par nos ressentis (fréquences émises). Mais là est un autre (et bien vaste) sujet qui ne saurait être résumé en quelques mots. L'important étant d'être aligné avec soi-même et d'émettre clairement et non de s'auto-parasiter à son insu.

    Cinétique et modulation de fréquence


    © Gabi Ben-Avraham

    En d'autres termes, pour établir un parallèle avec les bases de la cinétique, nous sommes chacun dans notre bulle perso (réalité) et lorsque ces bulles se croisent, parfois elles fusionnent (collision inélastique ou choc mou) mais parfois elles se repoussent (choc élastique). Si dans le cas des palets que l'on lance à une certaine vitesse dans un espace limité, cela est dû à la force d'inertie ; dans celui des bulles (réalités), il s'agit donc d'ondes de fréquence générées par la somme de nos pensées et ressentis. 

    À l'instar d'un poste de radio donc, deux ou plusieurs individus peuvent se trouver à émettre sur la même fréquence exacte et là, la communication est limpide. Le plus souvent, ils le font sur des fréquences voisines, ce qui permet de capter mais avec des interférences plus ou moins gênantes selon l'intervalle entre celles de l'émetteur et du récepteur. Lorsque l'on émet à des fréquences radicalement différentes, on n'entend plus rien et on est hors cette réalité-là. Elle ne figure pas sur notre écran radar aussi pour nous c'est comme si elle n'existait pas.

    En conclusion

    Voilà, j'espère que je n'ai largué personne en cours de route — dit-elle sans grand espoir, consciente du paradoxe de la complexité du principe pourtant simplissime qu'elle s'efforce d'expliquer ou de rappeler, non pas en Madame Je-Sais-Tout ni en donneuse de leçon, mais parce que si cela pouvait rendre service ne serait-ce qu'à une seule personne, elle n'aurait pas perdu son temps pour rien. Là où je voulais en venir, c'est que la manière dont les autres reçoivent nos émissions (perception + jugement) peut nous aider à moduler notre fréquence afin d'en éliminer tout parasite mais ne devrait nullement servir à nous enfermer dans un canal qui nous définirait en nous empêchant d'évoluer.

    Par là, j'entends qu'à force de se faire reprocher quelque chose pour peu que l'on ressente fortement cette critique (rarement constructive, souvent dictée par l'ego blessé ou la mauvaise foi d'autrui), elle parvient à laisser une empreinte profonde dans notre subconscient et nous finissons souvent par émettre, sans nous en rendre compte, sur la fréquence qui lui est associée en attirant tout ce qui vibre en accord : jugements similaires, situations renforçant cette impression et tendant à prouver que l'on est ainsi, etc. Il s'agit d'acceptation passive de l'opinion d'autrui. En travaillant pour s'améliorer, nous sommes dans l'acceptation active qui nous permet d'évaluer le chemin à parcourir (tant sur l'affect que sur la correction de certains de nos schémas ou comportements) ou de nous tester en quelque sorte. Ainsi même nos pires détracteurs peuvent nous rendre service bien malgré eux.

    Regarde le monde
    Débattre avec lui-même
    Afin de savoir qui va m'enseigner
    Le bonheur et la sérénité.

    "Dancing On The Jetty", INXS (1984)

    Je précise que cet article m'a été entièrement dicté par ma conscience supérieure (ou donnez-lui le nom que vous voudrez) — l'important étant que vous sachiez qu'il n'est pas le produit d'une longue cogitation mentale d'où l'absence de sources hormis le dictionnaire. À cela, j'ajouterai d'ailleurs que j'ai moi-même appris des choses en l'écrivant (et non, je ne suis pas schizo !). J'ignore s'il vous aura été utile et si vous y aurez compris grand chose, mais le cas contraire, je ne vous en voudrais pas le moins du monde pourvu que vous me le fassiez savoir en commentaire.

    Ey@el

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  • Commentaires

    1
    Samedi 23 Mai 2015 à 19:22

    Ton texte demande à être lu avec attention.
    Les écrits permettent d'exprimer ou de conceptualiser des choses que l'on ressent en soi parfois de façon confuse, mais tout écrit se retrouve limité, comme la parole.
    Par exemple, ta vision du jugement est clairement posée, et elle sonne juste (à mon avis).
    Cependant, comme il y a récepteur et émetteur, il arrive parfois que l'un se sente jugé alors que l'autre faisait juste constater quelque chose, par exemple.

    Il y a aussi l'épineux "problème" de la susceptibilité à tenir en compte. Nous n'avons pas, les uns les autres, les mêmes "niveaux ou critères" de susceptibilité.
    Ensuite et dans tous les cas, jugement ou non, il s'agit de savoir prendre du recul (après l'émotion passée) et de se demander : par exemple, l'autre m'a-t-il jugé moi, ma personne ou a-t-il émis un jugement sur quelque chose de moi. Je t'ai donné l'exemple des vêtements : ce n'est pas parce que je n'aime pas comme X est habillé que je juge la personne qui porte les habits.

    Y a beaucoup à dire sur le sujet...

    2
    Samedi 23 Mai 2015 à 22:15

    Je ne comptais pas faire une thèse là-dessus non plus ;)

    Il faut bien comprendre que cet article se pose du point de vue de celui qui subit un jugement et non de celui qui l'émet et qui n'est pas le sujet de cet article. Donc les susceptibilités d'autrui ne sont pas notre affaire mais leur responsabilité tout comme nos susceptibilités nous appartiennent et pas aux autres — un travail à faire sur nous, en rapport avec notre ego. D'ailleurs j'en parle dans ma conclusion en parlant d'ego blessé ou de mauvaise foi.

    3
    saby
    Jeudi 28 Mai 2015 à 08:11

    Bonjour 


    Bon,  tu parles très bien (enfin "ici" tu écris) .... je me suis perdue un peu parfois .... mon esprit ne se torture pas assez mais on ne se refait pas complètement même si on cherche à s'améliorer ..sourire..... ce que je peux te dire c'est que oui  l'interprétation  avec les émotions  je connais ça ....   et prendre tout à s'en  rendre  malade .... alors que l'on est  personnellement pas du tout visé (e)....  (soupir) .... travail énorme à faire mais ce n'est pas toujours très facile quand on est à fleur de peau  ..... 

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    4
    Jeudi 28 Mai 2015 à 15:53

    Hello !

    Ce n'est pas facile du tout, je te l'accorde. Dans une société où l'argent peut tout acheter, on se rend compte qu'il introduit la notion de moindre effort (quand on en a). La véritable valeur ne s'acquiert pas par la facilité et donc quand on arrive à conquérir des choses comme ça — se conquérir soi-même je devrais dire — et bien ça vaut tout l'or du monde. Quelle plus belle motivation que d'éradiquer la souffrance émotionnelle et être libre dans sa tête et dans son cœur ? Alors on ne se décourage pas et on fait un petit pas à la fois. À force, on finira bien par arriver à destination (comme dans la fable du Lièvre et de la Tortue).

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