• Le contrôle mental par les téléphones portables

    Article de R. Douglas Fields traduit par Ey@el

    Available in English

    © David Dees

    En traduisant cet article rédigé par un neuroscientifique concernant les avancées de la recherche sur les effets des ondes électromagnétiques émises par les portables sur le cerveau humain — dont « il n'y pas lieu de s'inquiéter » — je n'ai pu m'empêcher de repenser à Cellulaire, un roman de Stephen King, paru en 2006, dans lequel le monde entier basculait dans le chaos suite au déclenchement d'un phénomène de destruction baptisé "Impulsion" affectant tous les utilisateurs de téléphones portables et les transformant instantanément en fous sanguinaires zombiesques. Pas si tiré par les cheveux que cela quand on sait déjà tout ce dont les Élites sont capables pour nous arracher ce qui fait de nous des êtres uniques et multidimensionnels. Et puis, tout comme le roi Steve, je n'ai pas de portable moi non plus même si cet aveu en traumatisera probablement plus d'un.

    Ey@el

    Les signaux électromagnétiques des téléphones portables peuvent modifier vos ondes cérébrales et votre comportement. Mais ne ressortez pas tout de suite vos casques protecteurs en aluminium.

    L'utilisation des portables est interdite dans les hôpitaux en raison du risque d'interférence entre leurs émissions électromagnétiques et les appareillages électriques sensibles. Se pourrait-il que notre cerveau appartienne également à cette catégorie ? Certes, tous nos actes, pensées, sensations résultent de la bioélectricité produite par nos neurones et transmise par le biais de circuits neuronaux complexes à l'intérieur de notre crâne. Les signaux électriques entre les neurones génèrent des champs électriques émanant des tissus cérébraux sous forme d'ondes électriques qui peuvent être captées par des électrodes placées sur le cuir chevelu. La mesure de ces ondes par électroencéphalogramme (EEG) fournit aux médecins une compréhension fine de la fonction cérébrale et un outil diagnostique précieux. Elles sont, du reste, tellement essentielles aux fonctionnements internes de l'esprit, qu'elles sont devenues l'ultime définition juridique établissant la frontière entre la vie et la mort.

    Les ondes cérébrales varient en fonction de l'état d'alerte et de l'activité mentale consciente et inconsciente d'une personne en bonne santé. Mais les scientifiques peuvent faire bien plus que surveiller un cerveau en activité; ils peuvent contrôler sélectivement les fonctions cérébrales par stimulation magnétique transcranienne (TMS). Cette technique a recours à de puissantes impulsions de radiation électromagnétique transmises au cerveau pour bloquer ou stimuler certains circuits.

    Même si un téléphone portable est beaucoup moins puissant que la TMS, la question demeure : se pourrait-il que les signaux électriques émanant d'un portable affectent certaines ondes cérébrales fonctionnant en résonance avec les fréquences de transmission de l'appareil ? Après tout, le cortex cérébral de l'appelant n'est qu'à quelques centimètres du rayonnement émis par l'antenne du téléphone. Deux études apportent quelques révélations.

    La première, menée par Rodney Croft de l'Institut des Sciences Neurologiques, à l'Université de Technologie de Swinburne, à Melbourne, en Australie, vérifia si les émissions d'un portable pouvaient altérer les ondes cérébrales d'un individu. Les chercheurs observèrent les ondes émises par le cerveau de 120 hommes et femmes en bonne santé avec un Nokia 6110 — l'un des portables les plus utilisés dans le monde — fixé sur la tête. Le téléphone était contrôlé par un ordinateur selon une approche expérimentale à double insu, c'est-à-dire sans que ni le cobaye ni les chercheurs ne sachent si l'appareil était activé ou non durant la collecte de données électroencéphalographiques. Ces dernières ont révélé une amplification significative du tracé d'ondes cérébrales caractéristiques appelées ondes alpha dans le cerveau de l'individu lorsque le téléphone émettait. Cette intensification de l'activité des ondes alpha était plus importante dans les tissus cérébraux situés directement sous l'appareil, renforçant la thèse selon laquelle il était responsable de l'effet observé.

    Les ondes alpha du cerveau

    Les ondes alpha fluctuent à raison de 12 cycles par seconde (Hertz). Elles reflètent l'état de vigilance et d'attention d'un individu et sont généralement considérées comme des indicateurs d'effort mental réduit, de "ralentissement cortical" ou d'errance mentale. Mais ce point de vue traditionnel est sans doute un peu trop simpliste. Croft, par exemple, soutient que les ondes alpha régulent le changement d'attention entre les apports internes et externes. Leur fréquence augmente lorsque la conscience d'un individu passe du monde extérieur à sa réflexion interne; ce sont également les signatures principales des ondes du sommeil.

    L'insomnie induite par les portables

    Si les signaux d'un portable peuvent stimuler les ondes alpha des individus, les font-ils basculer de manière subliminale dans un état de conscience altéré ou ont-elles un effet quelconque sur le fonctionnement de leur esprit qui puisse être détecté dans leur comportement ? Dans la seconde étude, James Horne et ses collègues du Centre de Recherche sur le Sommeil à l'Université de Loughborough, en Angleterre, conçut une expérience afin de vérifier cette question. Le résultat fut surprenant. Non seulement les signaux d'un portable influençaient le comportement des individus pendant la communication mais ses effets perturbateurs sur l'activité du cerveau perduraient bien après que le téléphone eut été éteint.

    « Ce phénomène nous a surpris », me confia Horne. « Nous n'avions remarqué aucun effet sur l'EEG [après l'extinction du portable]. Nous voulions étudier les effets des signaux des portables sur le sommeil même. » Mais alors qu'ils se préparaient à leurs expériences de recherche sur le sommeil, Horne et ses collègues se sont rapidement aperçus que certains cobayes avaient du mal à s'endormir.

    Dans leur laboratoire, ils commandèrent un Nokia 6310e — un autre modèle de base très prisé — fixé sur la tête de 10 hommes en bonne santé mais manquant de sommeil (il avait été restreint à six heures la nuit précédente). Les chercheurs observèrent ensuite leurs ondes cérébrales sur l'électroencéphalogramme au fur et à mesure que le téléphone était activé puis désactivé à distance par un ordinateur et également commuté en mode "veille", "écoute" et "conversation" à intervalles de 30 minutes pendant plusieurs nuits. Cette expérience révéla qu'après que l'appareil eut été basculé en mode "conversation", des ondes cérébrales différentes appelées ondes delta (comprises entre 1 et 4 Hz) restaient atténuées pendant près d'une heure après l'extinction de ce dernier. Les ondes delta sont les marqueurs les plus fiables et les plus sensibles du sommeil de stade 2 — qui occupe environ 50% de la durée totale du sommeil — et les sujets sont restés éveillés deux fois plus longtemps après l'extinction de la transmission en mode conversation. Bien que privés de sommeil la nuit précédente, ils ne parvenaient toujours pas à s'endormir une heure après que le téléphone eut fonctionné à leur insu.

    Certes, cette recherche démontre que les émissions d'un portable peuvent affecter les ondes cérébrales d'un individu avec des effets persistants sur leur comportement, pourtant Horne n'estime pas qu'il y ait lieu de s'inquiéter d'un quelconque effet préjudiciable. L'excitation mesurée par les chercheurs correspond à l'équivalent d'une demi-tasse de café et de nombreux autres facteurs environnants affecteront le repos nocturne autant sinon davantage que les émissions d'un portable.

    « La portée de cette recherche », explique-t-il, est que malgré sa faible puissance, le « rayonnement électromagnétique [d'un portable] peut néanmoins affecter le comportement mental lorsqu'il est émis à la fréquence adéquate. » Il trouve ce fait d'autant plus remarquable que dans le monde actuel, nous sommes tous entourés de parasites électromagnétiques émanant de toutes sortes d'appareils électroniques. Les téléphones portables en mode conversation semblent particulièrement bien adaptés aux fréquences affectant l'activité cérébrale. « Les résultats indiquent, de manière subtile, une sensibilité au rayonnement de faible intensité. Ces constatations pourraient rapidement ouvrir la voie à d'autres recherches. On peut seulement se demander si à doses et durées différentes, ou avec d'autres appareils, les effets seraient plus importants ? »

    Croft et Swinburne soulignent que ces conclusions ne devraient soulever aucune inquiétude sanitaire. « Le plus intéressant est que cette recherche nous permet de voir comment il serait possible de moduler l'activité cérébrale et nous apprend quelque chose sur le fonctionnement du cerveau à son niveau le plus fondamental. » En d'autres termes, ces travaux sont importants en ce qu'ils permettent de jeter l'éclairage sur les mécanismes fondamentaux du cerveau — les scientifiques peuvent désormais s'en donner à cœur joie avec leurs ondes électromagnétiques auto-induites et apprendre beaucoup de choses sur la manières dont les ondes cérébrales réagissent et ce qu'elles font.

    Mind Matters est publié par Jonah Lehrer, le rédacteur scientifique à l'origine du blog The Frontal Cortex et du livre Proust was a Neuroscientist.

    Traduit de l'anglais par Ey@el
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  • Commentaires

    1
    Hélios22
    Samedi 31 Août 2013 à 10:43

    Moi non plus, pas de portable et je m'en passe fort bien. Pourvu que le scénario de King ne soit pas prophétique !

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    2
    Samedi 31 Août 2013 à 17:22

    Il a tout prévu Stephen King : il y a aussi la super grippe (Le Fléau), un dôme-prison au-dessus de nos têtes (Dôme), une invasion d'extraterrestres prenant possession de nos corps (Dreamcatcher)... bref rien qui ne figure déjà au palmarès du possible de nos chères Elites. Cela me rappelle vaguement aussi un certain H.G. Wells...

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