• Tu saignes pas ? T’as pas mal !

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    Article de Chrystelle Charlier

    J’ai mal au dos. Oui, je sais, tu t’en fous. N’empêche que j’ai tellement mal au dos que ça se prolonge dans la nuque pour exploser dans ma tête. L’impression délicieuse que mon cerveau se cogne contre les parois de mon crâne à chaque mouvement. Je fais mon boulot comme je peux, je vais aux events dopée aux anti-douleurs, je cours les kinés, les ostéos, les chiros, sans grand espoir et je vis avec.

    Bon, cela dit, je n’en fais pas un drame. Mais en discutant avec une lectrice choupi qui prenait de mes nouvelles et qui souffre, elle, d’un truc invisible mais horrible, j’ai pensé qu’il fallait qu’on en parle.

    La douleur invisible

    Les douleurs invisibles, parfois inexpliquées, sont souvent soupçonnées d’être du flan. Sauf que, au lieu d’être des glandeurs, certains souffrent tellement que leur vie est à peine supportable. Les arthritiques, les fibromyalgiques ou les polyarthritiques sont des malades qu’on ignore.

    Extérieurement, ces personnes sont comme vous et moi. De jolies filles, des hommes forts… Des gens qui ont l’air en pleine forme. Mais intérieurement, ces gens vivent en état de perpétuelle douleur, à des degrés divers, mais parfois intolérables.

    C’est ainsi que ma copine, parfois suffisamment handicapée par sa maladie pour dire que, sans son enfant, elle se serait probablement fait sauter le caisson histoire que ça s’arrête, s’est retrouvée un jour à présenter un certificat de maladie pour ne pas être assesseur. Une journée sur une chaise, c’était impossible, intenable, inenvisageable.

    La douleur insultée

    Mais cette copine est aussi impliquée dans la politique de notre pays et s’est, malgré tout, déplacée pour voter. Et se faire insulter. Parce qu’elle a le tort de ne pas porter sa douleur en étendard. Elle est jolie, elle sait sourire même quand elle a mal. Alors on l’a insultée.

    On lui a dit qu’elle « avait l’air très en forme pour quelqu’un qui ne pouvait pas être assesseur », on a joué les ironiques et, quand elle a essayé de s’expliquer, d’expliquer ce qu’elle vit au quotidien, le ton est monté et personne ne l’a crue. Elle est partie pleurer sur le parking.

    Alors non, elle n’en mourra pas. Pas plus qu’elle ne mourra de sa maladie. Mais devait-elle subir cette petite humiliation parce que rien ne met son problème en évidence?

    Et si elle avait été à un stade avancé de cancer, perruquée et pomponnée? Si elle avait été mourante mais que ça ne se voyait pas, hein? Elle aurait payé le même prix.

    Notre premier réflexe

    Alors je vous avoue que je ne sais pas comment j’aurais réagi, si je n’aurais pas moi aussi soupçonné ma copine de tirer au flan. Parce que c’est le premier réflexe que nous avons en fait.

    Et puis quand elle m’a raconté cette histoire, j’ai eu honte. Parce que c’est vrai, je n’y avais pas pensé. Des tas de gens sont malades, parfois incapables d’aller travailler et doivent pourtant se livrer à des activités obligatoires : faire des courses, conduire les enfants à l’école, aller voter… Et si ces gens n’ont pas envie de faire ces activités en étant en pyjama et décoiffées histoire de bien clamer que ça ne va pas fort, c’est clairement leur droit.

    Tout ceci pour vous dire qu’il faut y regarder à deux fois avant de médire. Rappeler aussi qu’il existe des maladies handicapantes invisibles. Et que ce serait bien, du moins pour notre humanité, de faire une place à ces vrais handicaps-là.

    Par Chrystelle Charlier
    © 2girls1mag.com

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  • Commentaires

    1
    B r u m e
    Samedi 16 Janvier 2016 à 19:23

    eh oui, il y en a des douleurs invisibles !!! les douleurs psychologiques le sont (pas tirs) mais pas toujours détectables surtout pour ceux qui ne savent pas observer et écouter.

    les gens ont vite fait de porter des jugements : ah celui ci ou celle là, il est comme ceci ou cela.... sans même savoir ce qui le/la traverse....

    et une souffrance invisible d'autant plus si elle touche une personne qui semble physiquement en forme, n'est pas considérée .

    belle soirée à toi la Miss ;)

      • Samedi 16 Janvier 2016 à 20:13

        Pour ça et bien d'autres choses comme la souffrance émotionnelle qui n'est non seulement pas reconnue mais qui fait peur. On pense que les gens sont fous et que ça se règle médicalement.

        Belle soirée à toi également Brume et ses belles lumières dans la ville ;)

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    2
    jack
    Dimanche 17 Janvier 2016 à 06:50

    Sujet délicat et douloureux qui touche à un moment ou à un autre chacun de nous. J'ai souvent remarqué que ceux qui souffrent le plus savent bien mieux que les autres le cacher

    Les gens se détournent de ceux qui se plaignent tout le temps, peut être est ce pour cela qu'ils se taisent et montrent bonne figure ?

      • Dimanche 17 Janvier 2016 à 14:55

        Ou peut-être qu'ils n'ont tout simplement pas envie de recevoir la pitié des autres (qui n'a rien à voir avec l'empathie mais plutôt avec une certaine forme déguisée de mépris) ?  Nous avons parfois (inconsciemment) le même comportement que les animaux qui abandonnent/écartent les canards boiteux (j'ai sauvé un canard boiteux  de ses congénères justement donc je sais de quoi je parle). La maladie fait peur. La souffrance fait peur. En fait, tout ce qui déroge aux normes et aux idées reçues (j'insiste bien sur ce qualificatif) est suspicieux dans notre société. Beaucoup de gens vont le nier mais au fond, leur attitude inconsciente prouve le contraire. Triste monde, du boulot en perspective. Changer en soi pour changer le monde. Tout un programme. ;)

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