• Le Blues de l'Armée rouge

    Article d'Ey@el et texte des Waterboys traduit par Ey@el

    Available in English

    Red Army Blues

    Quand j'ai quitté ma famille et mon foyer,
    Ma mère m'a dit :
    « Fils, ce n'est pas le nombre d'Allemands que tu va tuer qui importe
    Mais le nombre de personnes que tu vas libérer ».
    Alors j'ai fait mes bagages, brossé ma casquette,
    Et suis sorti faire mon entrée dans le monde.
    Dix-sept ans, jamais embrassé une fille.

    J'ai pris le train pour Voronej –
    C'était le plus loin qu'il puisse aller,
    Troqué mes sacs pour un uniforme,
    Serré les dents sous la neige.
    En cet été 43,
    J'ai prié pour notre Mère Russie.
    Et alors que nous repoussions les Allemands,
    J'ai vraiment cru que Dieu m'écoutait.

    Ensuite nous sommes entrés dans Berlin en hurlant.
    Nous avons démoli les bâtiments encore fumants,
    Hissé le drapeau rouge bien haut,
    Brûlé le Reichstag.
    J'ai vu mon premier Américain
    Et il me ressemblait beaucoup.
    Il avait un peu le même visage de fermier
    Et disait venir d'un endroit
    Appelé Hazard dans le Tennessee.

    Quand la guerre a pris fin,
    J'ai reçu mon certificat de libération.
    Moi et vingt mille autres,
    Nous sommes rendus en gare de Stettin pour y prendre le train.
    « Kiev ! avait dit le commissaire,
    Et de là vous rentrez chez vous par vos propres moyens ».
    Mais je ne suis jamais allé à Kiev.
    Nous ne sommes jamais rentrés chez nous.
    Le train a pris la route du nord jusqu'à la taïga.
    On nous a déshabillés et fait remonter
    La grand route de Sibérie en file indienne
    Sur des kilomètres et des kilomètres,
    Vêtus de rayures et de haillons
    Et laissés mourir dans un goulag.
    Tout ça parce que le camarade Staline
    Craignait que nous nous soyons trop occidentalisés !

    J'aimais mon pays.
    Je me sentais si jeune.
    Je croyais que la vie était la plus belle mélodie au monde.
    En 1945, j'aurais donné ma vie pour mon pays.
    Mais aujourd'hui, une seule chose demeure :
    La volonté brutale de survivre.

    © Mike Scott, 1982

    Traduit de l'anglais par Ey@el
    © lapensinemutine.eklablog.com

    À propos de cette chanson

    Cette chanson raconte l'histoire d'un soldat russe de l'Armée rouge conquérante qui s'empara de Berlin en 1945 pour vaincre Hitler. De retour chez lui, au lieu d'être accueilli en héros, il est envoyé dans un goulag pour y mourir parce que Staline craignait qu'après avoir côtoyé des Américains et d'autres Européens, lui et ses frères de combat répandent les idéaux occidentaux.

    Les paroles s'inspirent de deux livres : Le Soldat oublié de Guy Sajer (1965) et The Diary Of Vikenty Angarov (le Journal de Vikenty Angarov) de Victor Muravin (1978). Le premier étant écrit du point de vue d'un soldat allemand tandis que le second emprunte celui d'un soldat russe :

    Ces deux livres m'ont beaucoup inspiré et j'ai donc écrit cette chanson. Et je me souviens que ma copine de l'époque était une grande fan de Roxy Music. Un de ses titres préférés était "A Song For Europe" dans lequel Bryan Ferry terminait en chantant : « Jamais, jamais, jamais » (en français dans le texte — N.d.T.). J'ai donc piqué la séquence d'accords et concocté des paroles adaptées de ces deux livres. […]

    J'étais très inspiré et à chaque fois que j'arrivais à la fin d'un couplet, je voulais le terminer par une phrase percutante comme « Dix-sept ans, jamais embrassé une fille ». Ça ne venait pas des livres. Ça ne venait pas de "A Song For Europe". Ça me venait du cœur. Et donc je voulais une phrase percutante à la fin de chaque couplet pour vraiment intriguer les auditeurs.

    ~ Mike Scott

    À noter que Mike Scott a plusieurs fois modifié les paroles en concert, l'adaptant à son public. Ainsi en Allemagne, il ne dira pas « les Allemands » mais « les Nazis » pour bien marquer la distinction.

    Également, dans les nouvelles versions en concert (et sur le site officiel), dans le premier couplet, la mère dit : « C'est le nombre d'Allemands que tu vas tuer qui importe, va libérer ton pays ».

    Mike Scott en explique la raison :

    Des années après la sortie de cette chanson, j'ai reçu une lettre d'un Russe qui disait que chaque ligne de cette chanson était vraie excepté celle qui dit : « Ce n'est pas le nombre d'Allemands que tu va tuer qui importe mais le nombre de personnes que tu vas libérer ». Il m'a raconté que les gens étaient entrés en guerre « pour tuer des Allemands ». J'ai réalisé qu'en écrivant ces paroles j'avais laissé mon idéalisme de jeunesse déformer le sens et la véracité du texte en y insufflant un sentiment pacifique hors contexte. J'ai corrigé ça depuis.

    Voici une autre version live qui m'a fait beaucoup hésiter dans mon choix et dans laquelle le violon magique de Steve Wickham remplace le saxophone envoûtant d'Anthony Thistlewaite.

    Ou encore la version remastérisée avec des chœurs qui remuent les tripes :

    Ey@el

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